Une mission pour définir un « agenda rural »

Jacqueline Gourault, entourée des 5 membres de la mission agenda rural (de dr. à gauche), Daniel Labaronne, député d’Indre-et-Loire, vanik Berberian, président de l’AMRF, Pierre Jarlier, maire de Saint-Flour, Cécile Gallien, maire de Vorey, Patrice Joly, président de l’association Nouvelles Ruralités © F. Lavictoire/Communication du CGET

Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, a installé, le 29 mars dernier, une mission chargée de formuler des propositions au Gouvernement, d’ici juin prochain, pour élaborer un agenda rural.

Composée de personnalités reconnues pour leur expérience territoriale et leur connaissance des enjeux des territoires ruraux, la mission consultera de très nombreux acteurs de la ruralité, dont les initiatives contribuent à la politique de cohésion sociale et territoriale.

La construction de cet agenda rural s’inscrit dans le prolongement d’une résolution du Parlement européen. Elle prône l’adoption d’une politique spécifique aux territoires ruraux européens, à l’instar de l’agenda urbain européen que le CGET pilote, pour la France, avec la Belgique depuis 2015.

Jacqueline Gourault a rappelé l’importance d’appréhender les territoires ruraux dans toute leur diversité et de proposer des mesures qui améliorent concrètement la vie quotidienne de leurs habitants.

Changement de regard sur la ruralité

Comme la ministre de la Cohésion des territoires avait eu l’occasion de le dire, cet agenda doit servir de « feuille de route » pour la ruralité, d’ici la fin du quinquennat, au-delà des annonces que le président de la République est susceptible de faire lundi soir ou mercredi suite au Grand Débat. « Notre commande repose sur trois points, précise la maire de Vorey. Faire des propositions d’amélioration du quotidien des citoyens et des communes, accompagner les politiques publiques au niveau de toutes les transformations en cours (transition écologique, autonomie alimentaire, énergie, santé, numérique…), faire des propositions d’amendements pour les projets de loi en cours… » 

Mais le gouvernement se refuse à une loi globale sur la ruralité, comme le regrette l’Association des maires ruraux de France (AMRF), dont le président, Vanik Berberian, fait lui aussi partie de la mission. C’est d’ailleurs lui qui avait soufflé l’idée de cet agenda rural au président de la République en début d’année, le 14 janvier, lors de la remise des « cahiers de doléance » obtenus dans le cadre de l’opération « mairie ouverte », organisés par les maires ruraux avant même le lancement du Grand Débat. Réunis en assemblée générale à Najac (Aveyron) le 7 avril, les maires ruraux ont réitéré leur souhait : il s’agit pour eux de rompre « avec une pratique inefficace de priorisation du développement en faveur des métropoles » et de révéler au contraire « le potentiel des territoires ruraux par un changement de discours pour favoriser la vision positive de la ruralité », soulignent-ils dans leur résolution finale. C’était déjà le message positif que l’AMRF avait voulu faire passer pendant la campagne de 2017 avec ses « états généreux de la ruralité ». C’est aussi celui que Patrice Joly, autre membre de la mission, s’évertue à faire passer depuis quelques années avec son association Nouvelles Ruralités.
Après avoir maintes fois tiré la sonnette d’alarme, les maires ruraux n’entendent plus faire de concession. « Ne rien faire serait coupable, se contenter d’amender l’existant, irresponsable », préviennent-ils dans une motion adoptée à Najac, inquiets du « sentiment d’abandon » de leurs concitoyens.

Vers un agenda rural européen 

Mais l’agenda rural n’est pas un débat purement franco-français lié à la crise des gilets jaunes. C’est aussi une préfiguration de ce que serait l’agenda rural européen, une vieille idée portée par le Comité des régions reprise récemment dans une résolution du Parlement européen du 3 octobre 2018, en miroir à l’agenda urbain qui existe déjà. La proximité des élections européennes n’est pas étrangère à cette volonté de remettre la cohésion territoriale européenne sur le devant de la scène. « 60% des territoires européens sont situés en zone rurale ou quasi-rurale. Ils représentent à eux seuls 43% du PIB : seulement, il faut amener à penser différemment la ruralité qui a une vraie valeur ajoutée, un vrai potentiel de créativité mais on ne lui a pas porté jusqu’à présent l’attention qu’elle méritait », insiste Cécile Gallien. Alors que le programme européen de développement rural Leader connaît en France de graves difficultés d’ordre bureaucratique, Cécile Gallien tient à rappeler que « c’est un problème franco-français, l’Europe n’est pour rien là-dedans ». « Il faut arriver à inventer des politiques de coopération entre les espaces urbaines et ruraux, pour aboutir à une unité de la France mais aussi de l’Europe, insiste Cécile Gallien. La cohésion territoriale et sociale, cela va de pair. »